Article écrit le 23/06 – Par Sarah CANTET– Crédit image : 123RF
Berceau de l’Europe, voilà comment est qualifiée la Grèce Antique cinq siècles avant J.-C. En 1981, la nation hellénique fait son entrée dans la Communauté Economique Européenne (CEE) avant de rejoindre en 2001 la zone euro. Cependant, telle une histoire familiale, l’ainé, faiblissant, a nécessité l’aide de sa communauté.
Gestion européenne de la crise grecque
A partir de 2008, les finances publiques grecques sont touchées par le surendettement. En 2009 Papandréou, premier ministre, déclare que le déficit grec est de 13% du PIB. En 2011, la dette grecque atteint les 356 milliards d’euros. Néanmoins cette crise ne menace pas uniquement la Grèce.
En effet, si le pays venait à faire faillite et à sortir de la zone euro, la crédibilité associée à la monnaie commune viendrait à être entachée. En ce sens, à partir de 2012, des mesures européennes plus globales ont été prises avec la mise en place du Mécanisme européen de stabilité (MES) et du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) pour stabiliser les finances publiques nationales.
Sous la pression de la Troïka, composée de la Commission européenne, la Banque centrale européenne (BCE) et le Fonds monétaire international (FMI), la Grèce a accepté trois plans d’aide successifs, en contrepartie desquels le pays a dû lancer des réformes structurelles nécessaires à la reprise de la croissance.
- En 2010, 52,9 milliards d’euros de prêts bilatéraux,
- En 2012, prêts de 130,9 milliards d’euros fournis par le Fonds européen de stabilité financière (FESF),
- En 2015, prêts de 59,9 milliards du MES.
2018, remise à flot sous les radars
La Grèce a réaffirmé, en juin 2018, son engagement dans la poursuite des réformes adoptées dans le cadre du MES. Aout 2018 marque le terme du plan d’ajustement et d’assistance budgétaire permettant à la Grèce de revenir sur les marchés financiers.
Néanmoins, cette liberté est encadrée car soumise à un programme de surveillance renforcée, renouvelé tous les six mois effectifs jusqu’en 2022, afin que l’Union Européenne puisse s’assurer de la réalisation et la continuité des réformes nationales grecques ainsi que des évolutions économiques et de la soutenabilité de la dette.
Bateau de pêcheur face au bateau de croisière
Pour faire face à la crise, la Grèce s’est confrontée à l’Union européenne mais a aussi cherché des ressources ailleurs. Pour se faire, l’Etat grec utilise l’outil des privatisations, quitte à mettre sur le marché un de ses atouts : la gestion de la marine marchande.
En effet, le 8 avril 2016, le port du Pirée a été vendu à l’armateur chinois COSCO Shipping Corporation. Le contrat a rapporté à l’Etat près de 368,5 millions d’euros, soit une bouffée d’air lors de la crise mais, à plus long terme, une perte d’activités et de revenus non négligeable.
Un navire sauvé, pourtant l’équipage ne s’en sort pas indemne
Si la tutelle européenne et les investissements étrangers ont permis à la Grèce de rester dans la zone euro, la cure d’austérité imposée au peuple grec a eu un coup social élevé. En effet, entre 2011 et 2018, les ménages ont perdu un tiers de leurs revenus disponibles, les caisses de retraites ont été amputée de 26,5 milliards d’euros et le pays près d’un quart de sa richesse. Les impôts et la TVA, n’ont cessé d’augmenter – 24% pour le taux principal, en 2018 – si bien qu’à cette période la pression fiscale grecque se rapproche de celle de la Suède pourtant dans une tout autre situation économique.
Beaucoup d’observateurs ont craint un impact important de la crise sanitaire sur une économie et une société grecque déjà fragile. Cependant, malgré une situation critique avec une contraction du PIB de 25% en 2012 et divers plans de redressements ainsi que les impacts sociaux, le pays emprunte désormais à 3,87% contre 3,97% pour l’Italie.
2023 en eaux troubles ?
La population grecque reste endettée, sans sentir les effets de la reprise économique, malgré de bons indicateurs. 12,4% de la population active est au chômage ; plaçant le pays deuxième au sein de l’UE ayant le taux le plus élevé de sans emploi.
Cependant, si à première vue le taux d’endettement et le déficit budgétaire grec apparaissent importants par rapport aux autres Etats membres, la probabilité de défaut de paiement est faible à court terme. En effet, en termes absolus, la dette grecque est moins importante que celle de l’Italie par exemple.
Si la croissance de la Grèce se modère passant de 6,7% en 2022 à des prévisions entre 1,6% et 2,1% en 2023 elle reste supérieure à celle de l’ensemble des pays de la zone euro (1,4%). Le ralentissement est dû aux incertitudes mondiales notamment liées à l’approvisionnement en hydrocarbures et à la contraction de revenus réels à cause de la réduction du pouvoir d’achat, conséquence de l’inflation, malgré une reprise des recettes touristiques aux niveaux records d’avant Covid depuis 2022.
2023 marque également le premier budget établi sans la surveillance renforcée de la Commission ainsi que la continuation d’une diminution de la dette publique. Cette dernière passe de 206,3% en 2020 à 167,5% aujourd’hui. Elle reste élevée mais les bilans bancaires nationaux se redressent et le climat des affaires repart à la hausse.
Si les avancées économiques et fiscales sont réelles, elles ne doivent pas masquer la précarité de l’économie grecque.