Par Quentin Romet – Président d’Homunity
Article écrit le 15/03/2018
Fortes de leur succès naissant en France, les plateformes de crowdfunding françaises voient grand. Elles vont chercher de nouveaux projets à financer chez nos voisins européens et ambitionnent de faire profiter leurs clients de ces nouvelles opportunités d’investissement.
Jusqu’à présent, la règlementation en vigueur ne leur facilitait pas la tâche et freinait le développement du business à un niveau européen. Le 8 mars dernier, la Commission européenne a présenté un projet de loi qui devrait permettre aux plateformes de financement participatif françaises de développer leur activité en Europe.
Quentin Romet, Président d’ Homunity, plateforme française de crowdfunding immobilier, nous explique les impacts de ce projet de loi.
Comment lever des fonds dans plusieurs pays de l’Union Européenne ?
Aujourd’hui, les plateformes européennes peinent à effectuer des transactions frontalières, par faute de réglementation commune entre différents pays de l’Union Européenne (UE). En effet, une plateforme qui veut étendre son activité à l’international rencontre des difficultés techniques, car il faut s’adapter au mieux à la juridiction du pays ciblé.
Pour arriver à leurs fins, ces plateformes passent actuellement par divers biais, qui les obligent, dans la majorité des cas, à créer une entité légale séparée. Certaines mettent en place des filiales dans les nations cibles, qui sont régies par la juridiction locale. D’autres chargent un partenaire de collecter les investissements dans le pays en question, ou bien créent un véhicule d’investissement.
Dans tous ces cas de figure, cela entraine des risques, de la perte de temps, et des coûts. Ce frein à l’internationalisation de l’activité du crowdfunding devrait donc disparaître avec l’application de la proposition publiée début mars.
Un projet de loi visant à harmoniser ces transactions en Europe
La Commission Européenne avait fait 4 propositions pour encadrer ce marché transfrontalier du crowdfunding.
La première était de ne pas intervenir législativement au niveau européen mais de garder un dialogue entre les acteurs des différents pays concernés.
La deuxième était une mise en place de standards européens minimums pour déboucher sur une autorégulation.
La troisième proposition consistait en la création d’un régime européen pour ce type de plateformes, en les traitant comme des institutions de paiement régulées.
Enfin, la dernière consistait à créer un passeport européen, sans modifier les régulations nationales, pour favoriser l’export d’un pays membre à un autre. Ce dernier 8 Mars, c’est finalement cette dernière proposition qui a été retenue.
Un passeport européen qui prévoit plusieurs modalités
Tout d’abord, un agrément European Crowdfunding Services Provider (ECSP) sera créé pour les plateformes souhaitant s’étendre dans d’autres pays de l’UE.
Ensuite, une autorité supérieure supervisera les activités de ces plateformes dans ce cadre précis. Il s’agit de l’European Securities and Markets Authority (ESMA). Cette dernière sera donc en charge de délivrer l’agrément aux demandeurs.
Enfin, les montants levés seront plafonnés à 1 millions d’euros sur 12 mois pour les offres individuelles de financement.
En fait, ce passeport autorisera ceux qui le désirent, à disposer d’un « label » européen, qui leur permettra de réduire les coûts et les durées administratives lorsqu’ils veulent réaliser une levée de fonds dans un pays européen autre que le leur. À noter que ce passeport ne se substituera à aucune législation nationale.
Ce sont les plateformes en prêt ou titres financiers qui seront concernées par ce passeport. Cela représente une opportunité intéressante pour les entreprises installées déjà confortablement à l’échelle nationale. Il leur reste à évaluer les opportunités de ces nouvelles régulations.
Modalités d’obtention du passeport européen
L’ESMA posera aux plateformes désirant obtenir l’agrément ESCP plusieurs conditions.
Ces plateformes, tout comme au niveau national, devront justifier que leur activité n’est pas liée au blanchiment d’argent ou au financement du terrorisme.
Elles devront également fournir des informations sur le fonctionnement de leur activité : sur leurs montages juridiques et financiers, sur la façon dont sont sécurisées les informations personnelles.
De plus, les entreprises désireuses d’obtenir ce passeport devront indiquer avec précision les procédures mises en place pour lutter contre la fraude. Il leur sera également demandé les différentes étapes par lesquelles elles passent afin d’évaluer le risque de ce genre d’investissement.
Toujours concernant le risque, elles auront un devoir de transparence envers les investisseurs sur les risques que présentent ces investissements, ainsi que les frais qui leur seront imputés.
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