Article écrit le 27/12/2021 – Par MINGZI – Crédit photo : 123RF
Le Conseil d’analyse économique (CAE) vient de rendre publique une étude intitulée « Repenser l’héritage » dans laquelle sont proposées 4 recommandations visant à « réformer la taxation de l’héritage pour réduire les inégalités patrimoniales les plus extrêmes ». L’une d’entre elles consiste à réintégrer l’assurance vie dans l’assiette de calcul des droits de succession.
Le CAE est un organisme qui réalise des analyses économiques à la demande du Premier ministre et du ministre chargé de l’économie. Il est composé d’économistes universitaires et de chercheurs.
L’étude part du constat qu’en France, la part de la fortune héritée dans le patrimoine total représente désormais 60 % contre 35 % au début des années 1970, un phénomène qui alimenterait le renforcement des inégalités patrimoniales fondées sur la naissance et dont l’ampleur serait beaucoup plus élevée que les inégalités observées pour les revenus du travail.
Recommandation 1 : la création d’un système d’information transparent
Le CAE propose tout d’abord de construire un système d’information centralisant les données fiscales sur les droits de succession, sur la base des déclarations des notaires et des assureurs. En effet, l’absence d’un tel système rend, à l’heure actuelle, difficile le pilotage de la politique fiscale (impossibilité de prédire l’évolution des recettes, incapacité d’évaluer des mesures budgétaires et leur efficacité, risque d’insincérité budgétaire, etc.), l’information publique relative à cette politique, et le contrôle fiscal.
Recommandation 2 : calculer les droits de succession sur la base de la somme des flux successoraux perçus par les individus tout au long de la vie
Avec la mise en place d’une assiette de calcul des droits de succession basée sur la somme des flux successoraux totaux perçus par un individu tout au long de la vie, le taux d’imposition dépendrait uniquement de la valeur des héritages reçus, quelle que soit la façon dont le patrimoine a été transmis. Par exemple, un héritier ayant bénéficié de trois donations de 100.000 euros au cours de sa vie, et d’un héritage de 200.000 euros de chacun de ses deux parents payerait ainsi le même impôt que celui qui hériterait de 700.000 euros d’un de ses parents uniquement.
Par ailleurs, un tel système traiterait de manière identique les héritages reçus en ligne directe et en ligne indirecte, éliminant les distorsions du système actuel, distorsions dont la légitimité peut être remise en cause par l’évolution des structures familiales. Celui-ci demeurerait compatible avec les dispositions du Code civil et du droit des contrats, telles que la réserve héréditaire, la possibilité de démembrer la propriété ainsi que le libre choix du bénéficiaire des contrats d’assurance-vie.
Recommandation 3 : éliminer ou réformer l’assurance vie, le démembrement de propriété et l’exemption Dutreil à 75 %
En France, comme dans la quasi-totalité des pays taxant l’héritage, certains actifs et certaines modalités de transmission bénéficient d’exonérations. Toutefois, selon le CAE, les exonérations fiscales françaises ont la triple particularité d’être nombreuses, très généreuses par rapport à la norme fiscale et focalisées sur les actifs détenus en nombre par les individus les plus aisés.
Par ailleurs, le CAE considère également que le traitement différencié de l’assurance vie au titre des droits de mutation n’a pas de justification économique forte et contribue nettement à la complexité du système actuel. De la même façon, il considère que les démembrements de propriété ne se fondent pas non plus sur une justification économique forte, si ce n’est de bénéficier des exemptions dans le cadre des donations.
L’étude préconise l’intégration de l’assurance vie au barème général des droits de succession et également d’éliminer ou réformer le régime des démembrements de propriété et l’exemption Dutreil à 75 %.
Recommandation 4 : garantir un capital pour tous, versé à la majorité, sur la base de la citoyenneté
Dans son étude, le CAE préconise de garantir un capital pour tous, versé à la majorité, sur la base de la citoyenneté, afin de limiter les inégalités les plus extrêmes d’opportunité : « cela permettrait non seulement de réduire les inégalités les plus extrêmes de patrimoine dans le bas de la distribution, mais également de lever les contraintes de crédit ou de liquidité qui peuvent affecter négativement l’accès à l’éducation, à l’investissement, au logement pour la très grande partie de chaque cohorte qui ne reçoit rien, ou presque rien à la naissance ».